« Dans un incendie, entre un Rembrandt et un chat, je sauverais le chat. »
Giacometti
Le chat n’est pas un petit chien, et l’arrivée d’un chaton ne se prépare pas comme celle d’un chiot. Si ce dernier est un animal social, qui va devoir s’intégrer à la hiérarchie de la « meute » familiale, le chat est un animal essentiellement territorial, que nous allons immerger dans un environnement qui ne lui est pas forcémement adapté.
Comment choisir son chaton ?
En dehors des critères esthétiques et médicaux, le comportement du chaton peut influencer le choix. Dans une portée, il est évidemment préférable d’adopter celui qui semble le plus familier, le moins agressif envers les humains et les autres espèces animales avec lesquelles il devra éventuellement cohabiter (chien, lapin…). Un bon indicateur est fourni par le réflexe de portage : un chaton suspendu par la peau du cou, s’il a été bien socialisé, se recroqueville la queue entre les pattes et les yeux un peu vitreux, comme s’il était hypnotisé. En revanche, si le chaton se met en hyperextension, toutes griffes dehors, cela indique que sa socialisation n’est pas très bonne à ce stade, et que l’acquérir demandera sans doute quelques efforts. (Photos ci-dessous).
Photos ci-dessus : quelques exemples de bonne socialisation chat-chien.
Photo de gauche : réflexe de portage chez un chaton orphelin, présentant cependant toutes les caractéristiques d’une bonne socialisation : le chaton ne bouge plus et ferme à demi les yeux, comme sous hypnose. Photo de droite : même test chez un chaton né à l’extérieur, d’une mère sauvage. Avec un tel chaton, la vie en maison avec des humains risque d’être sportive… même si la socialisation peut encore s’acquérir, notamment jusqu’à l’âge de deux mois (période sensible chez le chat). Illustration en suivant ce lien.
À quel âge adopter le chaton ?
La chatte éduque son chaton pendant les premières semaines de vie : en le « punissant », (tape sur le nez, griffade sur le ventre), lorsque le chaton la mord ou la griffe trop violemment, elle lui apprend à se contrôler et à inhiber morsures et griffures. En réagissant avec calme aux bruits habituels du milieu extérieur ou à la présence des humains, elle lui apprend à ne pas avoir peur de tout. Cet apprentissage dure jusqu’à l’âge de 5 semaines minimum, et souvent jusqu’à 7 semaines : un chaton ne devrait donc pas être séparé de sa mère avant l’âge d’un mois et demi.
On ne choisit pas toujours l’âge auquel on acquiert son chaton, par exemple dans le cas d’un petit chat trouvé ou orphelin (photo ci-contre). Il est alors essentiel de jouer le rôle régulateur de la mère en « punissant » le chaton comme elle le ferait (ni plus ni moins, et en langage chat) lorsque celui-ci utilise ses dents ou ses griffes sur votre main : on donne un petit coup de doigt sur le nez, ou bien on retourne le chaton sur le dos et on lui griffe le ventre. Après quoi on arrête le jeu ou le biberonnage pendant quelques minutes. Il est démontré que les chatons orphelins ne contrôlent pas leur morsure ou leur griffure aussi bien que les chatons élevés par une « bonne » mère. Au propriétaire de jouer le rôle de celle-ci !
Préparer son territoire
Le chat est un animal plus territorial que social : dans la nature, il se constitue un territoire divisé en aires de repos ou d’isolement, en aires de chasse ou d’excitation, ces différentes zones étant reliées par des passages, et le tout étant balisé par différents marquages : urines, griffades, et phéromones faciales. Lorsque le chat arrive à la maison, nous lui imposons un milieu de vie dans lequel il lui sera parfois difficile de reconstituer une telle organisation territoriale. Il est donc essentiel que le chaton dispose au moins d’une aire d’élimination, (une litière facilement accessible, mais néanmoins tranquille et en dehors des passages), d’un endroit pour manger bien distinct de l’aire d’élimination, et de zones d’isolement, si possible en hauteur, où le chat pourra se reposer et dormir sans être dérangé. Il est prudent de prévoir des griffoirs verticaux à proximité des zones d’isolement, et d’éviter les tapisseries ou canapés à rayures verticales qui appellent les griffades ! (Photo de droite : La marquage par griffades, c’est mieux sur un arbre que sur le fauteuil du salon !)
On peut passer des heures immobile, à l’affût devant un trou de souris : voilà qui occupe une bonne partie de la journée !
Dans la nature, le chat chasse en moyenne 3 heures par jour, particulièrement au coucher du soleil. Il fait ainsi 12 petits repas par jour, séparés par des périodes de repos. Le chaton doit trouver des conditions de vie comparables dans son nouvel environnement : cela ne pose pas de problème s’il a librement accès à l’extérieur, mais s’il vit enfermé, il faut prévoir d’enrichir le milieu en jouets, mobiles, croquettes cachées un peu partout, afin de reconstituer dans la maison le caractère excitant d’un territoire de chasse.
Dans la mesure du possible, il est souhaitable que le chaton retrouve le milieu de vie qu’il a connu durant ses premières semaines : un chaton né et élevé dans la nature présentera souvent des troubles, (anxiété des milieux clos), s’il se retrouve confiné en appartement. Inversement, un chaton élevé dans un appartement calme aura parfois du mal à s’adapter à la vie à l’extérieur, dans un milieu riche en stimuli (syndrome de privation sensorielle).
Photo de droite : quand on a toujours vécu à l’intérieur comme Gargamelle, le jour où on se retrouve dehors, on se terre dans un coin et on n’a qu’une envie : qu’on vous ouvre la porte pour retourner dedans !
Quand on a entre les pattes un jouet avec une queue et des petites oreilles, c’est presque aussi bien que si on jouait avec une vraie souris ! et s’il y a une ficelle pour tirer dessus pour qu’on puisse lui courir après, c’est encore mieux.
Les premiers contacts
La période de socialisation du chat aux autres espèces que la sienne s’étend de la 2ème aux 7-9èmes semaines : pendant cette période, le chaton doit donc être souvent manipulé, et par différents types d’humains (hommes et femmes, enfants, adultes ou personnes âgées, etc). Il est démontré qu’un chaton manipulé dès l’âge de 3 semaines devient beaucoup plus familier aux humains qu’un chaton qui n’est manipulé qu’après l’âge de 7 semaines. La durée de manipulation optimum serait de 40 minutes par jour. Il est évident que ces manipulations doivent être agréables pour le chat ! Le caresser doucement, l’inciter à se frotter, jouer avec lui (sans se faire mordre ou griffer : voir plus haut), mais aussi respecter sa tranquillité lorsqu’il a décidé de s’isoler ou d’aller dormir ! Ces manipulations douces doivent, bien sûr, être poursuivies au-delà de la 7ème semaine : un chat correctement socialisé, mais qui perd le contact avec les humains, peut très bien se désocialiser au fil des mois !
Il se fait battre par l’autre chat !
L’arrivée du chaton est parfois chaotique lorsqu’un premier chat est déjà installé dans la maison : en général, le chat « résident » menace et crache jusqu’à ce que des règles de cohabitation et un partage du territoire s’établissent. Parfois, la situation dégénère, notamment lorsque les humains veulent s’immiscer dans les affaires des chats en punissant l’agresseur et en protégeant le nouvel arrivant : on peut alors en arriver à une situation où le chat résident, totalement obnubilé, passe ses journées à guetter et traquer le chaton, tandis que ce dernier fuit et se cache en permanence. Il peut aussi arriver que l’un des deux chats quitte définitivement la maison.
Lors de l’arrivée d’un nouveau chaton, il est donc conseillé de laisser les chats se débrouiller entre eux, et de n’intervenir qu’en cas d’agressions sévères de la part du chat résident, sans se laisser abuser par des charges et des feulements surtout destinés à impressionner. L’utilisation de phéromones d’apaisement, disponibles en spray ou en diffuseur, peut aider à stabiliser la situation. Si celle-ci dégénère malgré tout, les chats devront être présentés en consultation comportementale et médicalisés, avant que l’un des deux ne blesse l’autre ou ne quitte la maison. Plus d’informations sur les troubles de la cohabitation entre chats en suivant ce lien.