Bien passer l’hiver ? Bien passer l’hiver ? Je ne vois vraiment pas où est le problème !
Un petit préambule
Comme il fallait bien écrire un article de saison, vous trouverez ci-dessous quelques conseils pour aider nos compagnons à passer au mieux la saison froide – et accessoirement, les fêtes qui vont avec.
Attention, cependant : vous êtes présentement sur le site d’une clinique vétérinaires du Gard, vous lisez donc un article destiné à des chiens et des chats vivant entre Méditerranée et sud des Cévennes, région dans laquelle une température qui s’approche des 5 °C est déjà considérée comme sibérienne. Les mesures présentées dans cet article ne concerneront donc que les animaux exposés à un froid tout relatif, et nos amis savoyards ou québécois, de même que ceux qui rêvent de traverser l’Antarctique avec leurs chiens de traineau, s’informeront plus utilement sur d’autres sites.
Ce nécessaire préambule étant terminé, voyons maintenant les différents périls qui guettent nos animaux de compagnie du mois d’octobre au mois de mars – les mauvaises années !
Le froid
1 – Dormir dedans, ou dormir dehors ?
Commençons par enfoncer une porte ouverte : tous les animaux ne sont pas égaux face au froid, en fonction de leur race, de leur âge, de leur état de santé, et de leur mode de vie pendant le reste de l’année. Un Montagne des Pyrénées, un Saint Bernard ou un Bouvier Bernois, jeunes, en bonne santé et habitués à dormir dehors, ne voudront sous aucun prétexte rentrer à l’intérieur de la maison le jour où ils pourront (enfin !) gambader, voire passer la nuit, dans un jardin couvert de neige – ce qui arrivait quand même bien un jour tous les deux ou trois ans, aux alentours de Sommières et de Calvisson (si si, voir la photo ci-dessous), tout du moins avant le réchauffement climatique !
Pas de problème, donc, pour laisser un tel chien passer la nuit dehors, à condition qu’il dispose d’une niche bien isolée, surélevée, étanche, et à l’abri du vent. Il en sera de même pour un jeune matou habitué à faire sa vie à l’extérieur, qui ne rentre dans la maison que deux ou trois fois par jour, le temps d’avaler ses croquettes avant de retourner courir dehors – surtout si la nuit est froide et que la lune est pleine. (Photo ci-contre : « Froid, moi ? Non, mais vous m’avez regardé ? Rien que mon épaisseur de graisse… »)
Attention, le législateur a édicté un certain nombre d’obligations concernant les abris extérieurs réservés aux animaux de compagnie ; nous en reproduisons quelques-unes, en rapport avec notre sujet du jour. (Il y en a d’autres concernant la propreté, la surface disponible… on pourra les consulter en suivant le lien ci-dessus.
- Il est interdit d’enfermer un chien ou un chat dans des conditions incompatibles avec ses nécessités physiologiques, notamment dans un local sans aération ou sans lumière ou insuffisamment chauffé.
- L’animal doit disposer, en toutes circonstances, d’un espace suffisant et d’un abri contre les intempéries.
- La niche ou l’abri doit être étanche, protégé des vents et, en été, de la chaleur.
- La niche doit être sur pieds, en bois ou tout autre matériau isolant, garnie d’une litière en hiver.
- En hiver et par intempéries, vous devez prendre les dispositions nécessaires pour que votre animal ne souffre pas de l’humidité et de la température, notamment pendant les périodes de gel ou de chaleur excessive.
- Lorsque la niche est posée sur la terre ferme, votre animal doit disposer d’au moins 2 m² en matériau dur et imperméable ou en caillebotis pour éviter qu’il ne piétine dans la boue.
Bon, ce genre de niche, c’est bien pour se mettre à l’abri d’une petite averse de printemps, mais pour ce type de temps, ça va être un peu juste, et le législateur ne sera pas content !
Bon, tout ça, c’était pour les huskys, Saint-Bernards et jeunes matous intrépides ; à l’inverse, (pour continuer dans la série des portes ouvertes), un chien à poils ras ou un chat un peu planplan, habitués à vivre à l’intérieur, ne devront évidemment pas être laissés dehors lorsque la température descend trop bas.
Après, il se trouve toujours des situations où ce qui semble évident ne l’est finalement pas tant que cela :
- Que faire d’un jeune Berger allemand, ou d’un jeune Montagne des Pyrénées, destinés à dormir dehors, mais qui n’ont encore que trois, ou quatre, ou cinq mois, alors qu’arrivent les premiers froids ? Sans doute vaut-il mieux les garder dedans quelques mois de plus, et attendre le printemps avant de les habituer à la vie à l’extérieur. Ou alors, il faut qu’ils disposent d’une niche vraiment bien calfeutrée.
- Il en va de même du chien qui a toujours dormi dehors, mais qui tombe malade – ou devient simplement vieux : même si votre Berger allemand a une bonne niche avec d’épaisses couvertures, et qu’il a toujours vécu dehors, il sera prudent de le rentrer s’il est fatigué, peut-être en hypothermie, et a du mal à se déplacer, alors que l’on annonce des températures négatives pour la nuit prochaine.
- Et que dire du chien, souvent âgé, qui a toujours dormi sur la descente du lit ou sur le tapis du salon, et que l’on met brutalement dehors pour cause d’incontinence urinaire, de diarrhée chronique, ou de malpropreté due à une paralysie ? ce genre de situation est évidemment très difficile à vivre au quotidien pour les propriétaires, mais quelques dispositions doivent normalement permettre de conserver l’animal à l’intérieur – même si ce n’est plus sur la descente de lit : traitement contre l’incontinence, alèses que l’on dispose dans le panier du chien ou sur sa couverture…
Dans le doute, le mieux est certainement d’adapter la conduite à tenir à l’attitude de l’animal : si votre chat, habitué à dormir dehors, miaule lamentablement derrière la porte, un soir où des températures très basses sont annoncées pour la nuit… eh bien on le laisse rentrer !
2 – Froid et alimentation
Les animaux menant une vie active à l’extérieur par grand froid, auront des besoins énergétiques accrus. Il sera donc nécessaire d’augmenter les rations de 10 à 20 % dans ces moments-là, et éventuellement de remplacer l’aliment « d’entretien » par un aliment adapté au sport ou à l’effort, plus riche en protéines. Une transition alimentaire classique sera faite sur quelques jours lors du changement d’aliment.
Ces conseils sont évidemment valables pour le Husky qui va tirer un traineau toute la journée, pour le jeune labrador qui va faire de longues randonnées dans la neige avec son maître, ou pour le matou qui passe ses nuits à rôder, qu’il neige, qu’il pleuve ou qu’il vente. Le teckel un peu obèse qui n’abandonne son coussin, près du radiateur, que les quelques minutes nécessaires pour aller faire ses besoins dehors, avant de rentrer bien vite se mettre au chaud… n’aura certainement pas besoin de calories supplémentaires, même en cas de températures négatives !
3 – Maladies et problèmes divers liés au froid
ça fait peut-être un peu nunuche, mais il vaut mieux ça que de tomber malade : les chiens douillets, âgés, malades, récemment toilettés, à poils ras (voire sans poils du tout) ou vivant essentiellement à l’intérieur… pourront être équipés d’un manteau pour leurs sorties, lorsque la température baisse dangereusement. Cet accessoire sera évidemment peu utile chez un jeune chien au poil fourni. Si vous partez travailler pour la journée, il vaudra mieux laisser votre chat à l’intérieur avec sa litière et un bol de croquettes, ou confier votre vieux chien à poils ras à la voisine – parce qu’au bout de six ou huit heures sans sortir, il pourrait bien avoir du mal à se retenir ! Et bien sûr, en cas de symptôme respiratoire (toux, éternuements…), ou digestifs (diarrhées, vomissements…), pendant ou juste après une vague de froid, consultez rapidement votre vétérinaire.
A gauche, une jeune chien chinois à crête dont le corps, à l’exception de la tête, de la queue, et des extrémités des membres, est entièrement nu. A droite, un chat Sphynx, sans un poil sur le corps. Pour tous les deux, un manteau, ce n’est vraiment pas du luxe, et ce sans attendre d’avoir des températures négatives !
Il n’est peut-être pas nécessaire d’essuyer les pattes du chien à chaque fois qu’il rentre de dehors – sauf si l’on craint pour le carrelage de la cuisine, que l’on vient de nettoyer (Photo ci-contre). Malgré tout, si le chien est tout mouillé au retour de la promenade, ou si le sol extérieur est recouvert de neige ou de glace, il sera utile de bien sécher votre animal lorsqu’il rentre de dehors, en insistant particulièrement sur les pattes, et notamment sur les espaces entre les doigts. En cas de salage des routes, un rinçage des pattes à l’eau tiède devra précéder le séchage.
Si vous envisagez de faire marcher votre chien « citadin » dans la neige, (on parle ici de véritables randonnées dans la neige, pas de quatre flocons tombés à dix heures et fondus à midi), il sera nécessaire de protéger ses coussinets, à la fois pour éviter l’apparition de crevasses, mais aussi parce que les coussinets du chien jouent un rôle dans les échanges thermiques. Protéger les coussinets évitera donc d’importantes déperditions caloriques à votre animal.
Ce n’est pas que je sois délicat, mais ça fait quand même froid aux pattes !
Il existe des petites bottines conçues pour les pattes des chiens, mais elles ne sont pas toujours très pratiques : à essayer. Le mieux, quand on prévoit une assez longue marche dans la neige, (randonnée, chasse…), est d’appliquer sur les coussinets une solution tannante, en commençant quelques jours, voire quelques semaines avant. Si des crevasses apparaissent malgré tout, on les traitera à l’aide d’une pommade grasse et cicatrisante, de préférence dans des moments où le chien est couché. Votre vétérinaire pourra vous conseiller à propos des différents produits à appliquer sur les coussinets.
La réverbération du soleil sur la neige et sur la glace peut éventuellement poser problème, notamment chez les chats et les chiens à peau et muqueuses peu pigmentées. En particulier, les « coups de soleil » à répétition, (pas seulement dus à la neige, il est vrai), provoquent chez les chats à oreilles blanches et à truffe dépigmentée, des dermites solaires, qui peuvent évoluer à la longue, en cancer (carcinome) des oreilles et/ou de la truffe. (Voir la page de ce site consacrée à cette calamité). Il est possible de passer un écran total sur les zônes sans poils et dépigmentées. Un écran total spécialement conçu pour chiens et chats a récemment été commercialisé.
En ce qui concerne la protection des yeux… difficile d’adapter des lunettes de soleil au museau d’un chien, ou de les faire accepter à un chat. Le mieux sera alors d’adapter les heures et la direction des randonnées pour que les rétines de votre compagnon ne souffrent pas trop de la réverbération.
Enfin, attention à l’antigel utilisé pour la voiture. Aux dernières nouvelles, on ne s’en servirait plus trop aujourd’hui, mais s’il vous en reste un bidon dans un coin du garage, sachez que cette substance est très attirante pour les chiens, (elle est très sucrée), mais aussi extrêmement toxique : elle provoque une insuffisance rénale aiguë, mortelle dans la plupart des cas.
4 – Les traitements de routine : même quand il fait froid !
Commençons par tordre le cou à une idée reçue : si les premiers froids font généralement disparaître tiques, phlébotomes et autres moustiques, (et encore… voir la photo ci-dessous), les puces et les aoûtats, en revanche, sont toujours là et bien là !
Les puces (ci-dessous à gauche), vivent tranquillement à l’abri sous le pelage du chien et du chat, à la surface de la peau dont la température est supérieure à 30 °C. Les œufs qu’elles pondent tombent, pour l’essentiel, là où l’animal se couche, à savoir sur le canapé du salon ou sur le tapis de la chambre – voire sur le lit, avant de donner naissance à des larves, puis des nymphes, qui se développeront à la confortable température de la maison, sous les coussins ou entre les poils du tapis. Lorsque les nymphes se transformeront à leur tour en puces adultes, ces dernières pourront remonter sur le premier chien ou chat passant à proximité, perpétuant ainsi le cycle. Il n’y a donc aucune raison pour que les puces souffrent de l’hiver, même chez un chien vivant et dormant à l’extérieur : la paille ou les vieilles couvertures qui garnissent les niches constituent un excellent milieu de culture pour les insectes !
Contrairement à ce que leur nom pourrait laisser croire, les aoûtats (ci-dessus à droite), ne se manifestent pas qu’au mois d’août : on les rencontre même le plus souvent sur le cou ou les oreilles des chats pendant les mois les plus froids, en décembre ou en janvier.
L’idée couramment répandue selon laquelle on peut arrêter les antiparasitaires pendant l’hiver est donc erronée : les puces sont peut-être moins actives sous la neige que pendant les journées chaudes et humides du printemps et de l’automne, mais elles ne disparaissent pas pour autant. Et il nous est même arrivé de trouver, dans les tout derniers jours d’un mois de novembre, avec des températures négatives, une superbe tique gorgée au-dessus de l’œil d’un chien (photo ci-dessous), et deux cas de piroplasmose (maladie transmise par les tiques, avec une incubation de quelques jours à peine), tout cela dans la même journée !
Donc même en hiver, il est important de continuer à appliquer pipettes ou sprays insecticides sur nos animaux domestiques… sans oublier de traiter la maison ou la niche !
Parasites internes et maladies contagieuses (parvoviroses canine et féline, maladie de Carré, leucoses félines…), ne sont pas spécialement liés au climat, mais peuvent profiter d’un affaiblissement de l’animal pour prendre le dessus. En période de grand froid où les organismes sont soumis à rude épreuve, il faudra donc veiller à ce que votre chien ou chat soit correctement vacciné et vermifugé.
Les fêtes
Bon, d’accord, les cancers et l’insuffisance rénale menacent davantage nos adorables boules de poils que l’indigestion de foie gras ou l’intoxication par le chocolat Mais puisque nous sommes partis pour décrire les dangers de l’hiver, et que la période des fêtes en constitue un moment important… allons-y !
1 – Sapin, houx, gui… guirlandes et santons !
Avec la période des fêtes, des objets bizarres fleurissent dans les maisons et les appartements : sapin en bois ou en plastique, houx, gui, guirlandes, boules, étoiles et santons… toutes sortes de choses bien tentantes pour un animal curieux ! Attention donc aux explorations enthousiastes qui peuvent faire basculer un sapin mal calé, provoquer un incendie (bougies) ou un court-circuit (guirlandes électriques), une strangulation (guirlandes électriques ou pas), des coupures aux pattes (boules de Noël cassées), ou encore une occlusion intestinale, après ingestion d’un santon ou d’une guirlande.
Photo de gauche : même une branche de sapin en plastique est très amusante à mâchouiller ! et sur la photo de droite, ce petit oiseau en mousse dans son petit nid, s’il est malencontreusement avalé, risque de provoquer une belle occlusion intestinale.
Les boules de gui contiennent une substance appelée viscotoxine, qui provoque, quelques heures après ingestion, de l’irritation sur les muqueuses digestives (salivation, vomissements, diarrhée), de l’hypotension, des troubles neurologiques (pupilles dilatées, sursauts, incoordination et troubles de l’équilibre), et finalement la mort, lors d’ingestion importante.
Le houx provoque des symptômes comparables, mais généralement moins marqués. L’intoxication est plus rare à cause des feuilles piquantes, et rarement mortelle.
Il n’existe d’antidote pour aucune de ces deux intoxications. La première chose à faire est de placer ces deux plantes hors de portée de nos carnivores domestiques, et de surveiller les allées et venues de ces derniers ! Si par malheur votre chaton ingère des boules de gui, téléphonez rapidement à votre vétérinaire, avant de lui amener votre animal afin qu’il le fasse vomir – ou ne procède à un lavage d’estomac. S’il l’on s’y prend trop tard et que les toxiques ont déjà quitté l’estomac, il ne restera plus qu’à mettre en œuvre un traitement de soutien et de réanimation : perfusions, support des fonctions cardiaque et rénale, lutte contre les troubles nerveux…)
2 – Les excès de table (au sens large)
Moins anecdotiques que l’électrocution avec une guirlande ou l’empoisonnement avec du gui, deux maladies graves menacent tout de même les chiens qui veulent se goinfrer autant que leurs maîtres : la dilatation/torsion d’estomac, et la pancréatite.
Le syndrome dilatation/torsion de l’estomac (SDTE) n’est en aucun cas spécifique de la période du réveillon, mais les facteurs favorisants en sont un gros repas avalé goulument, éventuellement suivi d’un moment d’agitation, le tout de préférence chez un chien de grand format. Ces conditions se trouvent assez facilement réunies un soir de (gros) repas de famille. L’estomac déjà dilaté peut alors se tordre sur lui-même, et les gaz de fermentation ne pouvant plus s’évacuer, le ventre du chien se met alors à gonfler (photo ci-dessous à gauche). La peau du ventre est tendue comme un tambour dont elle fait d’ailleurs le bruit lorsque l’on tapote dessus, tandis que le malheureux chien fait toutes sortes d’efforts infructueux pour vomir. Faute d’une décompression rapide de l’estomac, par sondage si c’est possible, ou sinon par chirurgie, l’animal décède, parfois en moins de deux heures. Il s’agit d’une des urgences les plus graves rencontrées en médecine vétérinaire. Encore une fois, elle n’est pas spécifique d’un soir de réveillon, mais les conditions en sont tout de même un peu réunies ce soir-là… et devoir partir à la recherche d’un vétérinaire un 24 décembre à 23h30 gâche toujours un peu la fête. Une occasion de rappeler, au passage, qu’en cas d’urgence la nuit ou un jour férié, le premier réflexe à avoir est d’appeler votre vétérinaire : normalement, son répondeur vous indiquera toujours une structure de garde, ouverte pour les urgences. Pour plus d’informations sur le SDTE, voir cet article de notre site.
Photo de gauche : radiographie abdominale chez une chienne Munsterlander de neuf ans : l’estomac, tordu et rempli d’un mélange de gaz et de nourriture, apparaît gonflé comme une outre au centre de la photo. A droite : aspect échographique d’une pancréatite, chez un labrador de treize ans.
Bon, pas de panique quand même : manger trop, manger vite, manger gras… peut faciliter la survenue d’une torsion d’estomac ou d’une pancréatite, mais heureusement, ce ne sont pas tous les chiens qui fouillent dans les poubelles ou volent quelque chose sur la table, qui vont connaître ce genre de mésaventure ! Loin de là. En revanche, de « simples » indigestions sont également possibles : on voit alors arriver un chien (qui est d’ailleurs souvent un chiot), un peu vaseux, avec un ventre énorme. Une radio nous permet de nous assurer qu’il s’agit bien d’un estomac plein à ras bord de nourriture, et non d’un SDTE. La conduite à tenir se décidera bien sûr au cas par cas, mais il suffira le plus souvent de faire une injection au petit glouton pour le faire vomir, et le voir ensuite repartir soulagé, et l’estomac vide.
Et puis attention, le gigot n’est pas embêtant que par lui-même : la ficelle du gigot peut également faire des siennes ! (Photo de droite : toute la ficelle du gigot, au moment de son extraction de l’estomac d’une jeune chatte, qui vomissait depuis deux jours). Sans oublier les os de dindes, de poulet, et autres, qui peuvent se coincer dans l’œsophage, ou provoquer des perforations de l’intestin (voir le paragraphe sur les os dans notre article consacré à l’hygiène dentaire). Donc… attention aux restes de table.
3 – Chocolat et alcool, elle est pas belle, la vie de chien ? ben… non.
Terminons ce tour d’horizon des excès de table avec deux substances potentiellement addictives chez l’humain – l’une un peu plus que l’autre, tout de même – en commençant par le chocolat qui peut être responsable d’intoxications chez nos carnivores domestiques – la faute à la théobromine qu’il contient. La caféine du café et la théophylline du thé appartiennent à la même famille (les méthylxanthines), et provoquent le même genre d’intoxication, mais on a tout de même rarement vu un chien s’empoisonner en buvant du thé – à moins, peut-être, qu’il ne soit citoyen britannique. Il nous est tout de même arrivé de devoir traiter une intoxication par la caféine, chez un chien de cafetier qui avait éventré un sac de café en grains et en avait englouti plusieurs kilos ; il s’en était sorti, mais les symptômes, notamment neurologiques et cardiaques, avaient été sévères !
Pour en revenir au chocolat, définir une dose toxique est difficile, car elle dépend à la fois de la sensibilité individuelle du chien ou du chat, et de la teneur en théobromine du chocolat ingurgité. L’auteure d’une thèse vétérinaire sur le sujet (G. Brebion, 2016) a ainsi recensé, dans la littérature scientifique, des doses létales de théobromine (de théobromine, pas de chocolat !), variant de 1 à 5 (de 100 à 500 mg/kg de chien), selon les sources. Chez le chat, la dose létale est de 200 mg/kg… mais il est tout de même rare qu’un chat s’attaque à une tablette de chocolat noir. Plus concrètement, si on parle en « vrai » chocolat plutôt qu’en théobromine, la dose létale pour le chien est de 100 à 250 g/kg pour le chocolat au lait, et de 10 à 30 g/kg pour le chocolat noir, plus riche en théobromine. Les chocolats en ballotin (photo ci-dessous), ont une concentration en méthylxanthines inférieure ou égale au chocolat au lait, quant au chocolat blanc, il n’en contient quasiment pas. Les formes les plus dangereuses sont le chocolat en poudre et le chocolat à cuire, mais ce ne sont pas celles que l’on trouve le plus volontiers sur une table de réveillon. Attention, on parle bien là de doses létales, on peut donc avoir des symptômes de faible ou de moyenne gravité pour des quantités de chocolat bien inférieures.
Bref, pas d’inquiétude si votre petit dernier a donné un carré de chocolat au lait (ou même deux ou trois), à votre rottweiler : le chien n’en mourra pas ! En revanche, sachant que la plupart des tablettes pèsent dans les 100-150 grammes, une ou deux tablettes de chocolat noir pourraient être mortelles pour un Westie ou un bouledogue français d’une dizaine de kilos. Et beaucoup moins pour un chihuahua d’un ou deux kilos !
Maintenant, ça y est, c’est arrivé : Snoopy, dix kilos, a réussi à s’emparer d’une demi tablette de chocolat noir qui traînait sur la table de la cuisine, et il a tout avalé. Pas de panique quand même, on a quelques heures devant nous, mais il ne faut pas traîner non plus. On peut lire sur la page Facebook du CNITV (centre anti-poison vétérinaire de l’Ecole Vétérinaire de Lyon), à la date du 19/09/2024, que « contrairement à de nombreux autres toxiques, il est pertinent de faire vomir un animal intoxiqué au chocolat jusqu’à six heures après l’ingestion. En effet l’absorption du chocolat est lente, d’ailleurs les symptômes surviennent environ dix heures après l’ingestion ». Bon, six heures, c’est bien, une heure, c’est mieux. Donc, on prend Snoopy sous le bras, et on l’amène immédiatement à son vétérinaire – après avoir téléphoné pour prévenir de son arrivée, très important ! Là, on fera vomir Snoopy, et on lui fera avaler du charbon végétal activé, pour éliminer un maximum du toxique.
Si l’on découvre le vol du chocolat avec quelques heures de retard, et que les symptômes ont déjà commencé, à savoir en premier des troubles digestifs (vomissements, diarrhées, hypersalivation…), suivis de troubles cardiaques (tachycardie ou bradycardie, arythmie…), voire nerveux dans les cas les plus graves (agitation, démarche anormale, convulsions et finalement coma)… alors il faudra évidemment agir encore plus vite, et le traitement visera à soutenir l’état général du chien et à contrôler les symptômes, car il n’existe pas d’antidote spécifique.
Enfin, cela semble tomber sous le sens, mais l’euphorie de la soirée aidant… Ne jamais servir d’alcool à un chien ou à un chat, qui commence à trinquer (dans tous les sens du terme), à partir de 1 à 1,5 g/l d’alcool dans le sang ! (vomissements, convulsions, coma, et mort par arrêt cardiaque ou respiratoire).